ITER : Maîtriser la fusion de l’hydrogène

Près de quinze ans après ses débuts, l’assemblage du réacteur du projet international ITER a été lancé le 24 juillet dernier sur le site de Cadarache (Bouches-du-Rhône). Le processus devrait durer jusqu’en 2024. L’ambition de ce projet est de maîtriser la fusion de l’hydrogène. Pour y parvenir, des chercheurs du monde entier tentent de lever les nombreux verrous scientifiques. Parmi eux, Wouter Bos, chargé de recherche CNRS au LMFA.

Créer une énergie propre et sûre d’ici à 2050 : C’est tout l’enjeu d’ITER, projet pharaonique lancé en 2006. Il réunit 35 pays, soit toute l’Union européenne (Royaume-Uni inclus), la Suisse, la Russie, la Chine, l’Inde, le Japon, la Corée du Sud et les États-Unis.

Dans cet énorme réacteur en forme de donut géant, baptisé Tokamak, les scientifiques cherchent à recréer l’énergie illimitée produite par les étoiles, dans l’espoir de trouver une alternative aux énergies fossiles. Cette fusion pourra être obtenue en portant à une température de l’ordre de 150 millions de degrés un mélange de deux isotopes de l’hydrogène (deutérium et tritium) transformé à l’état de plasma. En bombardant la paroi du tokamak, les neutrons nés de cette fusion produisent de la chaleur qui sera évacuée par un circuit d’eau pour aller ensuite alimenter, sous forme de vapeur, une turbine et un alternateur, et produire en bout de chaîne de l’électricité.

Ce procédé n’a rien à voir avec celui employé dans les centrales nucléaires, reposant sur la fission pour faire éclater des noyaux d’atomes d’uranium. Cela génère une importante quantité de déchets et des risques de catastrophes nucléaires. « Au contraire, la fusion ne produit presque pas de déchets et son fonctionnement est sans risque de réaction en chaîne », assure Wouter Bos.

ITER pourrait produire son premier plasma fin 2025-début 2026 et le

BOS WOUTER

réacteur pourrait atteindre sa pleine puissance en 2035. Mais tout n’est pas si simple, et c’est là qu’intervient Wouter Bos. Le chercheur du LMFA travaille avec un doctorant, Wesley Agoua, et des collègues à Marseille sur la problématique des écoulements en présence de courants et de champs magnétiques (Magnéto Hydro-Dynamique, MHD), dont la compréhension est essentielle à la construction du prototype de réaction à fusion ITER.

Le plasma bouge de façon désordonnée au sein du tokamak. Wouter Bos et ses collègues cherchent à comprendre comment les confiner à l’intérieur d’un champ magnétique. Pour mieux comprendre la turbulence du plasma, le chercheur s’appuie sur la mécanique des fluides et essaie de transposer des idées valables pour les écoulements turbulents dans les fluides « simples » au cas du Tokamak. « Cela n’est pas évident : la température au sein du réacteur expérimental atteint 150 millions de degrés, soit 10 fois la température du soleil ! Les instabilités dues aux différences de températures et les propriétés du champ magnétique rendent la dynamique du Tokamak imprévisible et difficilement maîtrisable », explique Wouter Bos. « Mais d’ici quelques années, nous allons savoir, grâce à ITER, si la fusion nucléaire va être « le chemin » qui nous permettra de reproduire l’énergie du soleil. »

Retrouvez la chronique de Wouter Bos, diffusée sur la radio RCF Lyon le 14 septembre dernier, en podcast.

Une fois par mois, retrouvez ce rendez-vous radio avec les chercheurs de l'École Centrale de Lyon, qui viennent parler de leurs activités dans un langage accessible à tous.