Favoriser la recherche universitaire de haut niveau dans les établissements publics de l’enseignement supérieur
L’Institut Universitaire de France (IUF) est un ensemble d’enseignants-chercheurs sélectionnés par un jury international pour la qualité exceptionnelle de leurs recherches. Les membres lauréats restent en poste dans leurs établissements d’origine mais bénéficient d’une décharge d’enseignement partielle et d’une dotation budgétaire leur permettant de déployer leurs activités de recherche.
L’IUF est composée de :
- membres juniors : de jeunes enseignants-chercheurs de moins de 40 ans dont la qualité des travaux est exceptionnelle et qui ont besoin d’un tremplin pour développer leurs activités ;
- membres seniors : des enseignants-chercheurs qui ont acquis au fil de leur carrière une reconnaissance internationale ;
- membres internationaux invités (jusqu’à 10 par an).
Le soutien de l’IUF doit leur permettre de consacrer davantage de temps à leurs activités de recherche dans des conditions optimales et de déployer en parallèle des actions de diffusion des connaissances vers la société.


Laure Flandrin : spécialiste de la sociologie politique de l'entreprise
Ancienne élève de l’École Normale Supérieure de Lyon, laure Flandrin est agrégée de sciences sociales et docteure en sociologie. Ses travaux de recherche poursuivent trois objectifs dans trois domaines distincts :
- Contribuer à l’élaboration d’une science sociale du vivant, formulée par le sociologue Bernard Lahire, visant à dépasser les oppositions entre nature et culture dans une perspective réaliste ;
- Structurer un programme en sociologie politique de l’entreprise pour pointer les relations d’homologie entre l’État et les entreprises ;
- Contribuer à la formulation d’une éthique des ingénieurs et l'amorce d’une réflexion sur l’économie régénérative engagée par Centrale Lyon.
Structurer un programme de recherche en sociologie politique de l'entreprise
Grâce à cette nomination, Laure Flandrin souhaite structurer un programme de recherche en sociologie politique de l’entreprise. Il ne s’agit pas seulement de pointer ce fait que l’entreprise est un lieu structuré par des rapports de pouvoir, ni même d’élargir la perspective à la prise en compte du positionnement des entreprises sur des missions de type étatique. Il s’agit de marquer l’idée que l’entreprise est « habitée » par le public, dépendante de lui aussi bien matériellement que symboliquement, et par conséquent de mettre au jour les structures publiques des affaires privées.
Pierre Bourdieu mentionnait déjà, dans ses cours sur l’État au Collège de France, que « ce qu’on appelle le privé est, pour une grande part, en particulier l’entreprise, habité par le public. Il n’y a pas de secteurs de l’entreprise qui ne soient pas très fortement dépendants de l’État. Tous nos discours sur le libéralisme sont d’une très grande naïveté et l’intérêt de l’étude de l’État est précisément de montrer à quel point les sociétés différenciées sont pénétrées de part en part par la logique étatique » (2012).
Pourtant, la sociologie des relations entre l’État et les entreprises privées souffre d’un déséquilibre : les chercheurs et chercheuses en sciences sociales interrogent le plus souvent ce que le privé fait au public, plus rarement ce que le public fait au privé. Comme construction historique de longue durée, l’État continue néanmoins d’informer et d'inspirer le privé bien au-delà de ses fonctions classiques d’allocation du capital, de réglementation des marchés ou encore de formation de la main d’œuvre en amont du jeu économique, et de la redistribution des richesses en aval. C’est donc à un rééquilibrage de l’analyse des relations entre le public et le privé que le projet IUF de Laure Flandrin ambitionne de contribuer.
Dans le cadre du projet IUF, le point d’entrée dans cette sociologie se fait par l’analyse des pratiques de protection du capital informationnel des firmes qui sollicitent des experts en intelligence économique. Souvent issus du renseignement ou de la police, ces professionnels transfèrent aux entreprises les prérogatives sécuritaires de l’État : défense de la souveraineté, guerre, surveillance, secret, politique de mobilisation, justice d’exception. Ces déplacements renouvellent les formes d’encadrement du travail et interrogent le rôle politique des entreprises. S’il est surtout question ici de la main droite de l’État, le programme collectif en sociologie politique de l’entreprise vise à élargir la perspective aux pratiques des entreprises qui relèvent davantage de sa main gauche (capitalisme "d’intérêt général », missions socio-environnementales, etc.).
Produire et diffuser les connaissances
En parallèle des objectifs scientifiques, le projet de Laure Flandrin s’inscrit résolument dans un esprit de vulgarisation scientifique (émissions de radio, colloques et projets éditoriaux avec les éditions de La Découverte).